Éléments de définition
La prévention est l’ensemble des mesures sanitaires, techniques et éducatives destinées à éviter l’apparition d’un problème de santé (prévention primaire), sa transformation en maladie déclarée (prévention secondaire) ou sa récidive ou ses complications (prévention tertiaire). La prévention a pour objet la maladie et le risque, et renvoie à une conception particulière de la santé comme absence de maladie. Comme telle, elle présente des avantages indéniables : le centrage sur un problème à éviter ou à résoudre, la vision prospective (prévoir et prévenir), mais aussi des limites importantes. Trois types de prévention sont donc repérables.
Les trois types de prévention
L’Organisation Mondiale de la Santé (O.M.S.) distingue également ces trois types de prévention et les définit ainsi :
- la prévention primaire : elle comprend tous les actes destinés à diminuer l’incidence d’une maladie dans une population et donc à réduire le risque d’apparition de cas nouveaux. Ceci débouche donc sur un programme vaste d’amélioration de la qualité de la vie et des réformes d’institutions sociales. Elle se situe avant les processus pathologiques ;
- la prévention secondaire : elle rassemble tous les actes destinés à diminuer la prévalence d’une maladie dans une population, donc à réduire la durée de l’évolution de la maladie. Elle prend en compte le dépistage précoce et le traitement des premières atteintes afin d’éviter le développement de la maladie. Elle se situe pendant les processus pathologiques ;
- la prévention tertiaire vise à empêcher la maladie, déjà développée, de s’aggraver et de rechuter, grâce à un suivi et à un travail social, professionnel et familial. Elle se situe après les processus pathologiques.
Le National Institute of Mental Health américain souhaite se démarquer de la position très médicale de l’O.M.S. et va, lui, dans le sens de réduire la définition à la seule prévention primaire.
Pourquoi prévenir?
La prévention a pour but de modifier les comportements dommageables pour la santé, de proposer des choix favorables à la santé en fournissant à la population une information adéquate et en lui permettant d’identifier les comportements bénéfiques pour la santé. La capacité de faire des choix apparaît comme un objectif central à développer pour améliorer la santé.
La prévention renvoie à « l’ensemble des mesures visant à éviter ou à réduire le nombre et la gravité des maladies ou des accidents ». Ce ne sont pas nécessairement des mesures médicales mais ce peut être aussi des mesures législatives (ex : loi Evin) ou économiques…L’éducation à la santé peut aussi être un moyen de la prévention. (J.A.Bury, 1998, p.95).
L’objectif principal de la prévention est de permettre à la personne et à l’ensemble de la population de :
- développer sa santé ;
- promouvoir des comportements favorables à la santé ;
- modifier les comportements dommageables pour la santé ;
- développer sa santé en harmonie avec la société dans laquelle est inscrite la personne ;
- développer la santé de la communauté ;
- avoir la capacité d’atteindre les idéaux personnels et ceux de la société.
Une démarche de prévention doit pouvoir donner à l’individu et à l’ensemble de la population les compétences nécessaires pour qu’ils deviennent capables de gérer leur santé, de peser sur leur vie. L’objectif est donc la gestion de la santé dans son ensemble tout autant que de ce qui a trait à des domaines plus spécifiques de la santé.
Cet objectif principal se décline en objectifs secondaires :
- être informé sur l’état de santé et sur celui de la population ;
- être compétent pour développer les comportements favorables à la santé ;
- être compétent pour modifier les comportements et éviter les déterminants dommageables pour la santé conduisant à la survenue de dysfonctionnements bio-psycho-sociaux puis de maladie ;
- être capable de recouvrer la santé et d’utiliser les dispositifs d’aide disponibles à cet effet ;
- être capable d’utiliser les dispositifs permettant de se garder en bonne santé.
Les objectifs généraux et secondaires décrits plus haut sont pertinents en ce qui concerne une politique de prévention de comportements de consommation de substances psychoactives. S’y ajoutent des objectifs thématiques ou spécifiques à ces comportements de consommation. Ces objectifs nécessitent de concevoir les actions de santé dans leur ensemble, quel que soit l’objectif particulier que l’on se donne.
La gestion des risques
Dans notre système médico-social, les interventions préventives et curatives ne sont pas différentes par leur approche mais uniquement par le moment où elles se situent par rapport à l’évolution de la « maladie » ou du problème dans le temps. La prévention est en quelque sorte au service du curatif : « pour mieux guérir il faut prévenir ». La prévention est axée sur la gestion des risques : il s’agit d’abord d’identifier les individus ou les groupes « à risques » (par l’épidémiologie et le dépistage) et ensuite soit de les orienter vers le secteur curatif, soit de les éduquer (l’éducation à la santé par exemple) ou d’intervenir sur l’environnement de manière à diminuer le risque. Cette « gestion des risques » implique que l’on identifie les publics cibles à partir de caractéristiques négatives (comportements « déviants », manques). Une population particulière est donc marquée et stigmatisée par l’intervention préventive.
Dans la prévention axée sur la gestion des risques et orientée vers des publics cibles, l’aspect de contrôle social est particulièrement marqué. C’est un paradoxe de la prévention que lorsqu’elle veut s’orienter vers les groupes de populations qu’elle a désignées comme « à risque », elle les fait généralement fuir tant ceux-ci se sentent menacées par la répression plus ou moins violente des comportements « nocifs » que la prévention implique (ex. la peur du placement des enfants est une des raisons majeures de l’irrégularité du suivi préventif des jeunes enfants et explique la difficulté pour les travailleurs de terrain d’établir une relation de confiance avec les parents les plus exclus, difficultés d’atteindre les personnes « à risque » dans les programmes préventifs pour les toxicomanes, etc. ). La prévention comme « gestion des risques » est aussi à l’origine d’un profond malentendu entre professionnels et population « à risque ». Pour les professionnels, ce sont les comportements dits « à risque » qui constituent les « problèmes ». Et les interventions mises en place visent donc à lutter contre ces comportements. Pour les personnes concernées par contre, ces comportements constituent le plus souvent une réponse adaptative à un contexte de vie difficile (alcoolisme chez les mères enceintes très pauvres comme « calmant », par exemple).